ROLAND SABATIER lettrisme

 
 

(...) Les reproductions  sonores et visuelles, redéfinies dans le cinéma hypergraphique comme lettres, mots ou phrases, quittent, ici, leur traduction immédiate, habituelle, pour se retrouver dans le sonore où elles s'offrent pareillement, les unes à la suite des autres, comme une relation de ce qu'elles sont, de ce qui les différencie.

Dans ce film hypergraphique, la manière de ne plus montrer les éléments constitutifs importe plus que les éléments eux-mêmes. Ici, ce que l'auteur n'a pas accompli, c'est le spectateur qui doit l'entreprendre.

Pris entre un son qui articule des lettres et une photographie qui semble se suffire d'être ce qu'elle est, le cinéphile doit mentalement assurer les transpositions visuelles et auditives nécessaires qui engendreront la valorisation, c'est-à-dire le sauvetage de l'image.

(R.S., extrait de Oeuvres de cinéma 1963-1983, publications Psi, 1984)



NOTE SUR EVOLUONS (ENCORE UN PEU) DANS LE CINEMA

ET LA CREATION, DE ROLAND SABATIER

par Isidore Isou


"Le texte représentant la bande-son est constitué d'une énumération sèche de signes phonétiques, lexiques, idéographiques, où le retour énoncé d'une manière claire de symboles mathématiques ou abstraits m'a laissé l'impression d'écouter la révélation exotérique de nombres sacrés, secrets.

Cette voix qui presse contre la paroi des images construit autour de l'auditeur un labyrinthe doué de proportions difficilement déchiffrables, une architectonique mystérieuse où on étouffe faute d'y trouver la clé ou les clefs.

Ce film est réellement magique à la fois démoniaque et divin, car il est formé de cercles d'incompréhension constituant des abîmes de trouble terrorisant, au-delà desquels on perçoit la possibilité d'une échappatoire, une lueur, une aurore bénéfique qui serait constituée du dévoilement des secrets de notre emprisonnement.

Les images ouvertes, simples, bienheureuses, qui accompagnent comme bande-image, la bande-son fondamentale de l'algorithme, nous laissent espérer une existence faite de simplicité édénique, mais inabordable sans le dépassement du texte des nombres, symboles des relations qui nous emprisonnent.

Ce film ouvre de hautes possibilités de développement et d'épanouissement."


Texte d’Isidore Isou daté du 13 juin 1983. Publié dans Revue 7e, n°3, Automne 1983, et dans « Œuvres de cinéma (1963-1983) » de Roland Sabatier (Ed. Psi, 1984) sous le titre de « Note sur évoluons (encore un peu) dans le cinéma et la création, film hypergraphique polythanasé de Roland Sabatier ».



Lien sur filmographie (1963-2008)






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Roland Sabatier

EVOLUONS (ENCORE UN PEU) DANS LE CINEMA ET LA CREATION (1972).

Film hypergraphique partiellement polythanasé. 16m/m noir et blanc. Durée 25'. son magnétique, 25'  Production Psi, 1972 . Présenté pour la première fois en public au Festival d'Aubervilliers, en mars 1973. (Extrait)